JEUX DE SOCIÉTÉ
Cigale Mag N° 41
Novembre 2011
Casque vissé sur les oreilles, iPod à la main pour pianoter des SMS : les gadgets high-tech n’incitent pas à la communication. Les entreprises se plaignent de cette génération « iPodée », qui a tendance à se replier sur elle-même. Pour mobiliser les troupes elles ont donc recours au team building, aussi appelé « incentive ». On connaissait le saut à l’élastique, mais les participants ne voulaient pas tomber dans n’importe quelles mains. Trop risqué… Aujourd’hui les activités ludiques sont beaucoup plus « softs ». Fresques, jeux de piste, retour à la préhistoire, football, canyoning, marathon, les entreprises ne lésinent pas sur les moyens pour divertir leurs salariés, après des heures de séminaire. L’occasion pour les salariés de révéler une autre facette de leur personnalité.
Voilà maintenant trois ans que Franck
Malinowski, PDG d’Eclor, une PME de 500
personnes, qui distribue notamment les
cidres Écusson et Loïc Raison, puis depuis
peu les jus de fruits Danao, a recours au
team building. Il a commencé par emmener
près de 30 personnes dans le désert de
Tunisie.
« C’est lourd en terme de sécurité, mais
partager la même tente et le même repas
pendant une tempête de sable reste un
moment inoubliable pour mes collaborateurs
»,
explique le jeune chef d’entreprise.
L’an dernier, c’est dans le Cantal qu’il
s’est retrouvé avec une vingtaine de
personnes pour faire du vélo, du kayak et du
paintball. Et en septembre dernier ils
étaient une quinzaine à participer au
Paris-Versailles, avec toujours en tête le
jeune patron. Pour Franck Malinowski, grand
adepte du team building, ces activités
ludiques permettent aussi de mettre en
exergue les valeurs de son entreprise, comme
notamment l’esprit d’équipe, l’engagement et
la réactivité.
« Le côté reconnaissance et récompense
dans un cadre inhabituel est recherché par
les collaborateurs, précise le PDG,
surtout quand ils prennent plaisir à
tirer au paintball sur leur patron, comme
cela s’est produit dans le Cantal », ironise-t-il. Aucune activité n’est
décidée sans consensus. Chaque salarié a son
mot à dire sur le choix d’un événement :
« Nous avons discuté ensemble du
Paris-Versailles, poursuit Franck Malinowski.
Tout le monde n’avait pas la condition
physique pour courir le Paris-Versailles.
Le meilleur a mis 1h08, le plus « méritant
» 2h… Il n’y avait pas d’esprit de
compétition, l’important était de se
retrouver autour d’un projet et de porter
haut les couleurs de l’entreprise et aussi
de se retrouver tous pour déjeuner après
le marathon. »
Ravis de cette expérience, les
collaborateurs comptent bien remettre cela
l’année prochaine,
« mais il faudra être plus nombreux », estime l’un d’entre eux. Franck
Malinowski n’est pas dupe, si ces événements
sont appréciés, c’est aussi que les
collaborateurs se sentent bien dans
l’entreprise :
« Pour mener à bien ces projets, il faut
un état d’esprit, une ambiance
particulière et surtout ne pas forcer les
gens,
explique le PDG.
Ma philosophie n’est pas de mettre en
difficulté un collaborateur, mais qu’il
participe à un événement agréable dans un
contexte différent de l’entreprise.
L’occasion aussi d’amener plus de
solidarité entre les salariés ».
C’est son ami Thierry Adeline qui l’a encouragé dans cette voie. Marathonien devant l’éternel, il est toujours par monts et par vaux. Patron de Passion Running, des magasins de sports spécialisés dans la course à pied, il vient de lancer une nouvelle société : « Passion running services », qui offre des prestations de coaching, de sponsoring et de team building. Le 20 novembre, il organise un semi-marathon à Boulogne (92) avec 6 000 participants dont 1 500 Boulonnais, avant de s’envoler au marathon de New York. Selon cet ancien directeur commercial d’IBM, la course à pied est de plus en plus courue… « mais avant d’être envoyé au casse-pipe, il faut se préparer », tempère-t-il. C’est ce qu’il a fait notamment pour les salariés d’Eclor qui participaient au Paris-Versailles : « Le team building permet d’amener les salariés vers un projet commun à connotation sportive avec une notion de dépassement de soi. Généralement le patron y participe et se défonce autant que ses collaborateurs. En termes de motivation, transpirer ensemble est un excellent exercice ». Un challenge identique pour France Télécom, Gaz de France, la Poste et quelques PME qui participeront le 20 novembre à Boulogne (92) à un semi-marathon. « Ce phénomène d’appartenance en dehors du contexte professionnel est très apprécié », se félicite Thierry Adeline.