Passages à l’heure d’hiver

1ère Partie

Cigale Mag N° 36
Février 2011

Les passages couverts, longtemps laissés à l’abandon, sont désormais l’objet de toutes les attentions. Restaurés, repeuplés et réinterprétés, ces beaux témoignages du XIXe siècle renouent (un peu) avec leur vocation marchande d’antan et sont l’occasion de belles fl âneries à l’abri des frimas.


PASSÉ SIMPLE DE PASSAGES COMPLIQUÉS

Le XIXe siècle, âge d’or du romantisme est aussi celui des spéculateurs et des flâneurs qui, à la veille des grandes percées haussmanniennes, aspirent à un peu de calme et à plus d’argent dans un Paris encore soumis à l’héritage médiéval ; où les rues étroites, sans trottoirs ni égouts et inégalement pavées se révèlent aussi pittoresques que dangereuses.
En outre, une appétence pour le modèle des Souks orientaux (nous sommes alors au temps des colonies) ajoute à l’idée de réunir sous les verrières et le fer ouvragé, commerçants et échoppes de luxe largement ouvertes sur l’extérieur, éclairées au bec de gaz et agrémentées de larges miroirs plébiscités par mondains et demi-mondaines ; mais aussi par la gendelettre, éditeurs et imprimeurs qui vivent là pratiquement en vase clos dans un décorum néo-classique. C’est la belle époque des Passages, exubérants, classieux ou laborieux mais toujours superbes. Haussmann, les grandes gares parisiennes et l’essor des Grands Magasins (sous le Second Empire) mettent un terme à cette vie foisonnante et favorable aux prostituées priées désormais d’aller exercer leurs talents ailleurs (le préfet de Police Mangin sous Louis-Philippe leur interdisant « de paraître dans aucun temps et sous aucun prétexte dans les passages ». Le XXe siècle confirmera la désaffection du public et le désintérêt des dépositaires du Patrimoine… Jusqu’à une prise de conscience aussi tardive que salutaire à la veille de notre XXIe siècle qui redécouvre, grâce à l’influence des touristes étrangers, ces trésors enfouis.