Des vignes au pays du Cèdre

CHÂTEAU KEFRAYA

Cigale Mag N°37
Mars 2011

 

Depuis quelques années, les vins étrangers fleurissent sur les tables françaises. On entend souvent parler des vins chiliens, californiens ou australiens – rarement des vins libanais, pourtant régulièrement distingués par la critique œnologique internationale.

Il y a, non loin des bureaux de Cigale, un restaurant libanais qu’investissent régulièrement les membres de la rédaction. Là, entre deux phrases hautement spirituelles, journalistes, chroniqueurs et autres scribouillards de nos bureaux dégustent quelques exquis mezzes arrosés d’un nombre raisonnable de lampées d’un vin non moins exquis : le Château Kefraya. C’est donc assez logiquement que, lors d’un récent voyage au Liban, nous sommes allés faire un tour à la source. N’étant pas convaincu de l’intérêt que vous portez à nos excursions estivales, nous ne vous raconterons pas nos vacances par le menu. Nous ferons cependant une exception en ce qui concerne notre halte à Kefraya…

UN PEU D’HISTOIRE
Kefraya est une petite localité d’un millier d’âmes située dans la plaine de la Bekaa, à une soixantaine de kilomètres de Beyrouth. Selon les historiens, c’est de cette terre particulièrement fertile que furent tirés les premiers vins, aux alentours de 5000 avant Jésus-Christ. Quelques millénaires plus tard, en -3000, les Phéniciens, ancêtres des Libanais et experts dans l’art de la fermentation du raisin, y cultivent la vigne avec un savoir-faire internationalement reconnu, exportant leurs vins dans le monde entier – ou ce que l’on en connaît à l’époque. La luxuriante plaine de la Bekaa rime alors avec abondance et douceur de vivre. Dans la Bible, elle fait partie du pays de Canaan, synonyme de récompense divine. On reconnaîtra qu’en termes de références, on peut difficilement faire mieux… Puis les Romains investissent la région ; nous sommes au IIe siècle. À Baalbek – qu’on appelle alors Héliopolis, la ville du soleil – ils élèvent trois sanctuaires : un à Jupiter, le père des dieux, un à Vénus, déesse de la beauté et un troisième (le mieux conservé aujourd’hui) à Bacchus, dieu du vin et de l’ivresse. Dans ce temple, sous l’oeil rieur des jeunes filles chargées de grappes qui ornent les frises, on pratique un rite initiatique centré sur le disque solaire et l’inspiration du dieu Bacchus. Aucun doute : ne serait-ce qu’au niveau historique, la région est une terre de vin.